Ne pratiquant pas la dissection (hormis in vivo sur les prisonniers qui étaient torturés), les Chinois ont une vision du corps qui est donc externe. La peau et l’apparence restent les moyens les plus proches d’évaluation de la qualité/quantité de la vie et de la maladie.
La voie du mouvement et de la fonctionnalité
Il y a donc une voie privilégiée : celle du corps en mouvement, celle d’un corps fonctionnel plus qu’un attrait pour sa structure profonde observable et cartographiable uniquement grâce à la dissection. Il y a là selon les mots mêmes de Diderot en 1748, une « pensée des fluides basée essentiellement sur les circulations de toutes sortes ».
Le monde intérieur et son imaginaire
Ces fluides restent dans le domaine de l’imaginaire (ne pouvant les voir, il faut les imaginer, observer les effets de leurs mouvements) car le monde de l’intérieur est un monde fermé auquel l’on n’a pas accès. Le monde intérieur à l’écart des apparences est isolé du reste de l’univers par la peau, frontière qui délimite, organise et met en forme les flux intérieurs. C’est à partir de cette posture initiale que la science des pouls et de la palpation ont pu être surdéveloppées.
Se référer à d’autres expériences du monde vécu
Ce monde de l’imaginaire intérieur, afin de susciter chez le praticien des images mentales se référant à d’autres expériences du monde vécu, a utilisé dès le début des descriptions de pouls très sophistiquées qui peuvent apparaître poétiques mais qui, en fait, se réfèrent par analogie à des moments de vie que le praticien peut avoir déjà expérimentés. Le pouls est décrit comme « le mouvement des feuilles qui tombent des arbres par intervalle non réglé » ou bien « un poisson qui nage ayant la tête ou la queue immobile ». À l’inverse d’une démarche médicale scientifique, les caractéristiques recherchées sont plus du domaine du rêve éveillé que de l’objectivation rationnelle.
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